#Cannes2018 : Bilan de la première semaine de Festival

J’étais venu une première fois au Festival de Cannes en 2015, pour mon blog cinéma Oblikon.net. J’avais trouvé l’expérience intéressante mais j’en étais sorti épuisé et je n’avais pas souhaité renouveler l’expérience aussitôt. Entre temps, j’ai découvert le Festival de cinéma d’Edimbourg en 2016 et la Mostra de Venise en 2017.

Cette année, je me suis décidé à revenir à Cannes qui, quoi qu’on dise, bénéficie d’une aura unique. Je me suis fixé comme objectif de voir les 21 films de la compétition. En 2015, ou à Venise l’année dernière, je n’avais pas pu relever un tel challenge. Avec en plus quelques projections Hors Compétition et en s’élection Parallèle, je pense que je serais entre 25 et 30 films en fin de Festival. Sans compter les Courts Métrages, les articles à écrire et les soirées !

La première semaine de Festival étant terminée, je me suis dit que c’était l’occasion de faire un premier bilan. Et comme vous pouvez vous en douter, je suis déjà fatigué ! Mais trêve de bavardages, je vais maintenant vous parler des 13 films que j’ai découverts durant ces 6 premiers jours.

Mardi 08 mai – Ouverture du Festival

La journée était plutôt longue, et c’est vraiment dommage que les sections parallèles n’aient pas la possibilité d’ouvrir quelques heures plutôt afin d’occuper les festivaliers avant le film d’ouverture de la Sélection Officielle. J’ai donc commencé, sans surprise, mardi soir avec le film d’ouverture Everybody knows (sortie le 09 mai 2018), du réalisateur iranien Asghar Farhadi. Vous pouvez justement lire mon analyse sur Oblikon. Un film entre thriller et mélodrame pas mauvais mais un peu décevant quand on pense aux précédentes oeuvres du cinéaste.

everybodyknows

Mercredi 09 mai

Le lendemain, j’ai été voir Wildlife (sortie le 19 décembre 2018), film d’ouverture de La semaine de la critique.  Il s’agit du premier film réalisé par l’acteur Paul Dano. Il a d’ailleurs coécrit le script avec sa compagne Zoe Kazan, elle aussi comédienne. Il prend le point de vue d’un ado introverti de 14 ans qui constate et subit l’explosion de sa famille. Son tour de force est de proposer un regard subtil, plutôt neutre, sans jugement, des deux parents, de leurs faiblesses et de leurs comportements. Le résultat est assez classique, dans la veine de beaucoup de films indépendants américains, mais plutôt réussi.

Le soir même, j’ai été voir Yomeddine, film égyptien du réalisateur A.B. Shawky. Il s’agit du seul premier film sélectionné en Compétition Officielle cette année. Le résultat, sympathique mais anecdotique, est un Feel Good Movie à l’américaine dans lequel les deux personnages principaux, Beshay, un ancien lépreux et Obama, un ado orphelin traversent l’Egypte (bien différente de l’image de carte postale avec les pyramides) en mode roadtrip et en quête de réponses sur leurs origines. Si le film se laisse regarder avec plaisir, j’ai été assez dérangé par la fin. En effet, le père de Beshay justifie le fait de l’avoir abandonné et de n’être jamais revenu afin que celui-ci trouve le bonheur. Si ce n’était que le point de vue du père, pourquoi pas. Cependant, les images montrées par le réalisateur à ce moment-là semblent aller dans le sens de ces propos. Je trouve ce discours « d’isolement » assez dur, surtout que le personnage de Beshay n’est plus du tout contagieux. A titre personnel, ce discours me perturbe beaucoup, et je ne souhaiterais pas du tout vivre dans une société qui recommande ce type d’accompagnement pour les malades ou personnes victimes de handicap.

Jeudi 10 mai

Le lendemain, j’ai été voir Leto (sortie le 05 décembre 2018), beau film russe engagé et audacieux. C’est mon premier coup de coeur de cette quinzaine et vous pouvez lire ma critique sur Oblikon. Le soir, j’ai été voir Plaire, aimer et courir vite, le nouveau film du réalisateur Christophe Honoré (sortie le 09 mai 2018). J’ai été très touché par ce film, notamment parce que je me suis beaucoup retrouvé dans la personnalité de Jacques, l’un des deux personnages principaux.

film leto

Vendredi 11 mai

Je n’ai pas visionné que des long métrages. J’ai aussi eu l’occasion d’assister à la remise des prix pour le concours de courts métrage Nespresso Talents. Cela m’a permis de découvrir plusieurs courts assez intéressants, notamment dans l’utilisation d’un format inhabituel : le 9/16e. J’ai ensuite vu Cold War (sortie le 31 octobre 2018), un film très réussi de Pawel Pawlikowski sélectionné en compétition officielle. Si vus avez déjà vu Ida du même cinéaste, la démarche de mise en scène en scène est très similaire, mais pas pour autant redondante. Le film réussit, en seulement 84 minutes, à raconter près de 30 ans d’amour passionnel avec justesse. Juste après, c’était Le livre d’image de Jean Luc Godard. Forcément, c’est expérimental, et si certains passages se suivent plutôt avec intérêt, notamment grâce à un travail visuel loin d’être inintéressant, je reste assez dubitatif sur le fond, assez inaccessible dès lors que l’on n’a pas une bonne connaissance des sujets abordés. Le cinéaste a d’ailleurs poussé l’expérimental jusqu’au bout puisqu’il ne s’est pas déplacé pour la conférence de presse à laquelle il a participé… via Facetime !!!

conference de presse facetime

J’ai terminé la journée avec Les éternels de Jia Zhang-Ke (sortie le 26 décembre 2018), petit bijou qui retrace 15 ans de changements impressionnants  pour la Chine à travers une histoire d’amour et son évolution.

Samedi 12 mai – Une journée anti-femmes ?

Depuis 15 ans maintenant, je m’intéresse beaucoup au cinéma Coréen. Au fil du temps, cela a même créé un intérêt pour le pays en lui-même, où j’ai eu l’occasion de vivre 5 mois en 2014. Forcément, J’étais impatient de découvrir les films Coréens présentés au Festival de Cannes cette année. Le premier est The spy gone north, en sélection officielle mais Hors Compétition. Par de nombreux aspects, il me rappelle le film qui m’a fait découvrir le cinéma coréen : Joint Security Area de Park Chan Wook. Les relations entre la Corée du Sud et la Corée du Nord y sont abordées avec une approche résolument humaniste. Même si le film n’atteint pas le génie de son prédécesseur, il est efficace, et si comme moi on est intéressé par l’histoire de ce pays, il est même passionnant et très émouvant. Il ne s’agit peut être par d’un grand film, mais c’est quand même un coup de coeur !

Le soir, j’ai été voir Les filles du soleil de la réalisatrice française Eva Husson (sortie prévue le 21 novembre 2018). Je ne sais pas si vous avez pu voir passer des critiques du film, mais globalement, elles sont assez virulentes. Si le scénario manque un peu d’équilibre et si j’ai trouvé la mise en scène vraiment quelconque, je les trouve très dures. Le film a quand même certaines qualités et est, à défaut d’être subtile, plutôt efficace dans son approche du sujet. Pour ceux qui n’en ont pas entendu parler, on peut dire que, d’une certaine manière, c’est « un film de femme, par une femme et sur les femmes ». Comme on parle beaucoup de proportion de femmes dans l’industrie du cinéma, à la réalisation de films ou même en compétition à Cannes (Pour rappel 3 femmes sur 21 nommés cette année), j’ai voulu voir la proportion de femmes parmi les critiques. Et si l’on regarde la première page de Google (recherche effectuée le 14 mai 2018), le résultat est sans équivoque : 8 critiques par 8 hommes !!!! Mais où sont les femmes ? Les critiques seraient-elles les mêmes avec une parité parmi les critiques ?

Si l’on regarde en deuxième page, on trouve 7 critiques, dont 3 réalisées par des femmes. C’est un peu plus équilibré, et comme de par hasard, les critiques sont beaucoup plus nuancées voire positives !! Une vraie problématique que les rédactions se doivent de prendre en considération, et si elles ne le font pas, peut être que le festival devrait  rendre des mesures au niveau des accréditations. Et dire que quelques heures plus tôt, les médias s’emballaient avec une montée des marches composée uniquement de femmes…

montee-marches-femmes

Dimanche 13 mai

Pour terminer cette première semaine de Festival très intense, j’ai été voir trois films. Pour commencer, Trois visages de Jafar Panahi (sortie le 06 juin 2018). Une mise en abyme assez intéressante du réalisateur et de son actrice, qui jouent leurs propres rôles dans ce film. Hélas, la fatigue du festival ne m’a pas permis de l’apprécier pleinement. L’après midi, j’ai été voir le Meurs, Monstre Meurs, un film d’horreur argentin plein de promesses. Et si beaucoup de choses, notamment en terme d’ambiance visuelle et de symbolique, sont très intéressantes dans le film, je considère que les 20 dernières minutes, beaucoup trop explicites, sont assez ridicules et ruinent tout…

Pour terminer cette première semaine, j’avais prévu de me faire une soirée « party » sur une des plages du Festival. Mais la fatigue a eu raison de moi. J’ai tellement lutté contre le sommeil pendant plusieurs films que j’ai ressenti le besoin de voir quelque chose de plus léger. La projection du film de Gilles Lellouche, Le grand bain (sortie prévue le 24 octobre 2018), tombait donc à pic. Attention, je ne crie pas au grand film de cinéma, mais Le grand bain est un film populaire réussi, avec de très bons acteurs et, choses rare pour ce genre en France, une mise en scène travaillée et réjouissante.

Mon Palmarès à mi-chemin

Pour le moment, je n’ai vu que 9 films sur 21, mais je vais déjà m’amuser à établir un premier pronostic sur le Festival, plus basé sur mes préférences personnelles que sur de véritables tendances.

Palme d’Or : Leto
Grand prix : Les eternels
Prix de la mise en scène : Cold War
Prix d’interprétation masculine : Rady Gamal (Yomeddine)
Prix d’interprétation féminine : Zhao Tao (Les eternels)
Prix du Jury : Plaire, aimer et courir vite
Prix du scénario : Trois visages

Comme la règle l’exige depuis 1992, un film ne peut pas obtenir plusieurs prix (sauf interprétation). On retrouve 6 films sur les 9 que j’ai pu voir dans ce premier Palmarès, qui sera surement très différent dans quelques jours. Mais ça, c’est déjà une autre histoire…

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Christopher Guyon

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