Comment ajouter des conflits dans un scénario ?

Ecrire un premier scénario de court métrage, film ou autre n’est jamais chose aisée. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il convient d’ajouter du conflit et donc de faire souffrir ses personnages. Pourquoi est-ce un élément essentiel de tous les scénarios, quelles sont les diverses formes du conflit, comment les amener et, par la suite, les résoudre ? Tant de questions dont les réponses sont cruciales à la construction d’une histoire.

Quel intérêt pour un scénariste ?

Si certains se demandent vraiment s’il est possible de faire un bon scénar sans aucune forme d’opposition aux personnages, la réponse est non. C’est le conflit qui crée tout l’enjeux et l’intérêt de l’histoire. Sans lui, rien à raconter et donc rien à partager au spectateur.

Une fois qu’un combat est intégré à votre histoire, essayez d’imaginer les luttes secondaires du récit. En effet, avoir un conflit c’est bien, en avoir plusieurs, c’est mieux. Ce sont ceux en arrière-plan qui permettent de tenir en haleine le spectateur et qui lui feront s’attacher (ou non, selon l’effet recherché) aux personnages. Pour imager, si ces derniers commencent à un point A et veulent atteindre un point C, ils doivent passer par B, l’obstacle. Ici, seul le passage au point B est intéressant puisqu’il y a uniquement à cet endroit de l’action et un réel enjeu. En revanche, tout ce qui le précède et le succède ne donneront pas plus de sens à l’histoire à moins que l’on rajoute, là aussi, des problèmes inattendus à résoudre. Il faut créer de l’émotion et faire vivre à ses protagonistes des aventures, aussi courtes soient elles.

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Plus que les conflits, c’est l’entièreté des techniques scénaristiques qui doit être maîtrisé. Trouver une bonne idée et se lancer peut être plus compliqué que prévu, c’est pourquoi nous vous conseillons de lire notre article sur l’écriture d’un scénario de court-métrage. Prenez aussi le temps de vous renseigner à ce sujet en lisant certains ouvrages de notre sélection des meilleurs livres pour apprendre à écrire un scénario.

N’hésitez pas à vous y reprendre à plusieurs fois pour rendre votre histoire la plus passionnante possible

Quels types de conflits ?

Le conflit interne

Le conflit peut tout d’abord être interne au personnage. C’est lui-même qui est torturé et l’on suit alors la manière dont il se bat contre ses problèmes, sa nature ou ses doutes. Le spectateur y trouve de l’intérêt car il voit le protagoniste évoluer et devenir une nouvelle version de lui-même.

Pour illustrer ceci, prenons l’exemple d’Anakin Skywalker dans Star Wars. Esclave à la base et grandissant loin du monde des Jedi, il apprend qu’il est « l’élu » et est conduit à quitter tout ce qu’il connait pour rejoindre les Jedi. Cependant, n’ayant pas appris dès sa petite enfance à contrôler ses émotions comme tout bon apprenti, il est torturé par la mort de sa mère et la pression qu’on lui impose. Penchant alors en son for intérieur pour rejoindre l’idéologie adverse, celle des Siths, on assiste à un fort combat interne entre l’Anakin Jedi et l’Anakin du côté obscur de la force.

Le conflit entre ennemis

Le type de conflit le plus courant, notamment dans une première histoire, est celui de l’opposition de deux personnes ou groupes d’individus. On suit généralement un personnage ou clan dans sa lutte contre son ennemi et ce, jusqu’à ce que l’un gagne ou perde. Que ce soit pour des raisons idéologiques, matérielles ou de reconnaissance, il doit y avoir une explication à cet affrontement. Longtemps du point de vue des héros, ce type de conflit peut désormais nous faire suivre les antihéros dans leur bataille contre le bien. Il est bien plus rare de trouver un scénario ne prenant partie pour aucun des adversaires, accordant autant de temps à l’image à l’un qu’à l’autre.

Parmi la multitude de films qui suivent ce schéma, on retrouve Mars Attack de Tim Burton. Film pourtant comique, on y retrouve plusieurs êtres humains qui se battent contre les martiens venant de débarquer sur Terre et cherchant à annihiler l’espèce humaine. Nous reconnaissant plus en ces Hommes qu’en les extraterrestres, on porte une attention particulière à chaque étape pouvant rapprocher les humains de la victoire.

Les conflits amoureux

Bien que les conflits amoureux aient une importante dimension interne, les personnages en souffrance nécessitant toujours de moments d’introspection pour arriver à s’en sortir, c’est avant tout un mal subit par plusieurs personnes. Cela peut provenir d’un amour non partagé, interdit, impossible, reposant sur des mensonges, doutes ou incompréhensions, le rendant difficile à s’épanouir. Le but est alors de parvenir à sa réalisation en bravant ceux et ce qui se mettront en travers de son chemin.

Par forcément présent que dans les films à l’eau de rose, on peut tout aussi bien croiser ce genre de conflit dans des films comme Django Unchained, un western signé Tarantino. Ce qui anime Django, joué par Jamie Foxx, est la quête de sa bien-aimée qui est encore esclave alors que lui vient de recouvrir sa liberté. Déjà mariés, il n’est pas question d’un amour non partagé mais brisé par la distance et leur statut. En effet, esclave, Broomhilda est contrainte d’offrir son corps aux amis du maitre qu’elle sert. Sachant éperdument qu’il est impossible de simplement la retirer des griffes de son bourreau, Django doit mettre en place un stratagème visant à sauver celle qui aime pour qu’elle finisse à ses côtés.

Le conflit familial ou amical

S’il y a bien un conflit que l’on peut trouver dans les films type « tranche de vie » souvent catégorisés comme « drame » c’est celui familial ou amical. Une relation compliquée peut aisément se situer au centre des préoccupations du personnage principal qui cherchera à résoudre cette situation.

L’excellent Mommy de Xavier Dolan en est l’exemple parfait. Diane, veuve, se retrouve à s’occuper seule de son fils Steve souffrant de troubles psychiques. Leur relation, bien que remplie d’amour, est dégradée par leurs incessantes disputes dues au comportement de Steve. D’autre part, Kyla, une timide voisine, survient dans leur vie comme un pilier pour cette famille sans connaissances extérieures. Alors qu’elle devient vite leur plus proche amie, elle aussi se détache de Diane, ne partageant pas ses choix dans l’éducation de son fils. Désespérée face à sa solitude, cette mère seule essaye part tous les moyens d’établir une relation stable et heureuse avec son fils et sa voisine.

Mommy de Xavier Dolan met en avant la vie tumultueuse de Diane (à gauche), son fils (au centre) et leur voisine Kyla (à droite)

Le conflit sociétal

Pour finir, on parlera du conflit lié à la société dans laquelle évoluent les personnages. Si ces derniers sont en désaccord avec la manière dont agit leur communauté, leur but devient alors de changer les mentalités et actes de leur société où règnent les injustices. Cela peut être totalement fictionnel comme dans Hunger Games ou plus simplement historique comme dans toute œuvre mettant en avant les résistants de guerre.

Par exemple, dans Les figures de l’ombre, Theodore Melfi retrace l’histoire vraie de trois femmes noires travaillant à la NASA à la fin des années 60. Elles se retrouvent à combattre le racisme fortement ancré dans leur société, dans l’espoir de voir leur travail et leur personne reconnus pour ce qu’ils sont et non pour leur couleur de peau.

Bien évidemment, on retrouvera souvent plusieurs types de conflits à la fois au sein d’une même histoire pour l’enrichir. Si on reprend notre premier exemple, Star Wars, il ne met pas en avant que le subtil conflit intérieur de Anakin. Ses vrais ennemis sont, à la base, les Siths. C’est aussi son mentor, presque son père, et ami Obi Wan qui s’inquiétera des choix de son padawan, créant une autre tension avec ce personnage. De nouveau, la société ne permettant pas que les Jedi s’engagent dans une relation amoureuse afin qu’ils contrôlent aux mieux leurs sentiments, le force à cacher son amour pour la princesse Padmé et rend compliqué leur union. Une fois devenu Dark Vador, il ne partage plus la vision vers laquelle évolue son univers acceptant l’esclavagisme qui a tué sa mère et finit par croire dur comme fer que c’est le mal qui doit régir sa société. Il est donc seul face à tous ces éléments conflictuels qui en font de lui un personnage far et inoubliable de la saga.

Conflits et obstacles : Comment s’y prendre ?

Une fois les combats à mener choisis, encore faut-il savoir comment les mettre en place, puis, quelles sont les façons d’y mettre un terme. Ces étapes sont cruciales puisqu’elles forgent l’évolution du personnage lors de l’arc transformationnel que les spectateurs attendent et qui conclura ainsi l’histoire.

Comment les amener ?

De fait, il faut savoir quel moment est le plus propice à leur apparition. La structure d’un scénario étant décisive, il est essentiel de la maîtriser. Le plus judicieux est d’établir une « timeline » afin de situer dans le temps chacun des points cruciaux d’un conflit : raison du conflit A, éclatement du conflit, obstacles à surpasser, résolution du conflit A. Bien sûr, il ne tient qu’à vous de décider l’ordre dans lequel vous voudrez dévoiler ces éléments aux spectateurs. Ainsi, vous pouvez commencer l’histoire in media res, alors que le conflit entre deux personnages est déjà clairement établi, et n’en dévoiler la cause que bien plus tard. Cependant, il sera plus rare, même par le biais d’un récit flashback, que la résolution du conflit, la toute fin de l’histoire, soit dévoilée dès le début. Au contraire, vous pouvez commencer l’histoire en établissant le contexte, sans aucun problème apparent, puis utiliser un flash forward pour laisser découvrir qu’un conflit va survenir et que la vie bien établie qui nous a été présentée va connaitre un chamboulement. En revanche, une fin au conflit est systématiquement nécessaire. Bien que l’on retrouve des fins ouvertes laissant libre cours à notre imagination et des sagas dont les œuvres se suivent, ne pas boucler ou faire grandement avancer le combat du protagoniste risque de décevoir les spectateurs.

Comment les résoudre ?

Si trouver un conflit est chose facile pour vous, il en est peut-être moins lorsqu’il faut le résoudre. Par chance, il y a autant de manières de les résoudre qu’il n’y a d’histoires. Bien évidemment, si le récit se déroule dans un monde fantastique, les possibilités s’en retrouvent décuplées car l’on peut inventer un objet magique ou faire venir un personnage mystique dont les pouvoirs aideront à faire disparaitre tout problème. Plus généralement, cela va être un événement marquant et fort qui permettra de faire basculer le conflit dans l’oubli.

La source de cet événement peut être la trouvaille d’un objet important qui permet de reconsidérer ou de régler la situation. Cela peut être ce que le personnage principal cherchait déjà à trouver, sa quête, ou quelque chose d’inattendu le ramenant à la raison et à des souvenirs apaisants. Par exemple, un album photo lui rappelant à quel point la famille est importante et qu’il doit donc pardonner à ses parents. L’objet en question peut également apporter une information jusque-là manquante et qui change tout à notre vision du récit. L’album photo feuilleté par le personnage peut tout aussi bien lui révéler un élément jusqu’ici non aperçu, comme une adresse au dos d’une photo, lui permettant de découvrir une vérité qui le réconciliera avec ses proches ou lui-même.

De même, cette info déterminante peut être apportée par l’arrivée d’un personnage. Cet épicier au coin de la rue qui, sans le savoir, donne un conseil qui va permettre au protagoniste d’ouvrir les yeux sur sa situation. C’est tout autant l’apparition que la disparition d’un personnage qui peut créer le choc nécessaire à la résolution du conflit. La mort d’un proche fait prendre conscience à toute la famille que la vie est courte et entame alors une réconciliation après des années de disputes.  

Evidemment, quand le conflit provient d’ennemis ou de la société, c’est généralement la victoire d’un des deux opposants qui permet d’en finir avec les problèmes. Ainsi, la fin d’une guerre ou d’une bataille peut marquer le point d’arrêt d’une histoire. La finir par un simple avantage prit sur l’ennemi, annonçant alors que les chances de gagner dans le futur se renforcent pour l’un des camps, peut aussi laisser entendre que le conflit arrivera prochainement à terme.

Dans Slumdog Millionaire, la fin des problèmes de Jamal sonnent lorsque sa victoire est enfin admise et récompensée

Dans le cadre d’un vrai drame, il est possible qu’il n’y ait pas vraiment de résolution et que le conflit perpétue à tout jamais. Parfois, le personnage principal trouve la mort avant d’avoir pu résoudre le problème, laissant au spectateur s’imaginer si une victoire reste possible ou si tout est perdu. C’est, en soit, une forme de résolution du conflit que de tuer celui qui doit l’affronter et une manière comme une autre de terminer son histoire.

Aller plus loin

Si vous avez aimé cet article, approfondissez vos connaissances du scénario avec des livres tels que l’Anatomie du scenario qui vous permettront d’accroître vos connaissances théoriques. Vous serez alors dans les conditions idéales pour laisser parler votre créativité tout en respectant un cadre et les attentes des professionnels du cinéma.

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Victoire

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